A l'occasion du salon Marjolaine, Yann Arthus-Bertrand et Pierre Rabhi ont livré leurs visions du développement durable dans un entretien à L'Express.
Portraits : Yann Arthus-Bertrand a rencontré l'écologie dans les airs et veut toucher le grand public à travers ses images. Pierre Rabhi, penseur et écrivain, partisan de la décroissance, a découvert l'environnement les pieds dans un lopin de terre cévenol. Leurs visions des années à venir, aussi troublantes de clairvoyance que différentes, se rejoignent sur deux constats: l'attentisme des hommes politiques et l'urgence de changer le système.
Extraits de l'entretien...
Où en sera le développement durable en France en 2020?
Yann Arthus-Bertrand: En 2020 et plus encore en 2030, nos modes de vie auront complètement changé. Car la France et le monde devront s'adapter d'ici là au manque le pétrole. L'économie mondiale dépend totalement de cette ressource. Des villes entières fonctionnent et existent uniquement grâce au pétrole. Dans vingt ans, nos déplacements, l'organisation des villes et de nos vies quotidiennes seront guidés par une nécessité de sobriété.
Pierre Rabhi: Le développement durable n'aura pas fait changer significativement nos modes de consommation d'ici à 2020, si l'argent et la croissance restent les priorités absolues. Pour l'instant je considère que nous faisons fausse route. Pour changer les choses efficacement, dans les années
qui viennent, je crois profondément en la pédagogie par l'exemple.
Les agro-carburants débouchent sur une impasse, l'éolien fournit peu d'énergie et s'avère une solution insuffisante. Qu'en pensez-vous?
Pierre Rabhi: Les citoyens refusent toute réduction de leur consommation et de leur confort. Mais tant que nous ne renoncerons pas à notre boulimie énergétique, je ne vois pas comment progresser. Je prêche donc la modération et je pense même qu'il ne faut pas avoir peur du rationnement.
Yann Arthus-Bertrand: Aujourd'hui, nous avons besoin de toutes les sources d'énergie: l'éolien, le photovoltaïque et les autres énergies renouvelables, mais aussi le nucléaire dont on ne peut pas se passer pour l'instant. Cela dit, il faut réduire réduire réduire! Or le système encourage la consommation: plus on consomme, meilleur c'est pour le pays.
On continue à construire des autoroutes, malgré la crise écologique et les promesses du Grenelle. Pourquoi?
Yann Arthus-Bertrand: Parce que nous sommes dans un pays où tout ce qui a été planifié, que ce soit un an ou dix ans en arrière, voit le jour, parfois en dépit du bon sens. Nous manquons vraiment de
réactivité...
Pierre Rabhi: On construit des autoroutes pour aller chercher à des centaines, voire des milliers de kilomètres, ce que nous sommes capables de produire dans nos régions. C'est une grave erreur...
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GC.